Si la saga des espions venus du froid vous manquait, n’hésitez pas à en lire un nouvel épisode!
L’article est réservé aux abonnés donc pour qui ne le serait pas, vous serez privés ou épargnés d’une narration plutôt savoureuse.
Parce qu’au-delà de la thématique devenue récurrente des espions russes, c’est la manière d’en rendre compte qui est à apprécier.
Car en somme, on comprend que cette nouvelle affaire n’en serait, en réalité aucune mais que, malgré tout, elle pourrait bien en être une quand même.
Bref, de la littérature qui n’a pas grand chose à voir avec celle que cette heureuse initiative propose et dont il est question dans un article, lui aussi réservé aux abonnés.
La Genevoise Yelena, prénom courant à l’Est de l’Europe, a eu l’idée de transformer deux anciennes cabines téléphoniques désormais hors d’usage, en bibliothèques.
Or il se trouve que le fils d’un jeune homme qui se rend souvent sur ce lieu appréciable de culture, s’appelle Aliosha. Et voici que son prénom suscite un curieux échange de commentaires.
Quant à l’article relatif aux espions qui en seraient sans en être, il fait réagir une seule commentatrice d’un simple « N’importe quoi! »
Medias
Pour qui l’a vécu, Mai 68 et les années qui ont suivi restent dans les mémoires. Pour qui a connu ce temps de révolte, nul n’oublie comment s’y glissaient les courants libertaires.
Or les voici désormais contestés, les exemples ne manquent pas qui le démontrent.
Le dernier en date vise l’écrivain Gabriel Matzneff, plus personne n’y échappe vu le battage médiatique qui entoure la sortie du livre que Vanessa Springora a consacré à sa relation avec lui.
Pourquoi y revenir encore et encore? Parce que cette affaire interpelle à maints et divers égards, en témoigne cet article que je vous invite très vivement à lire.
Rester conscient, toutefois, qu’avec le temps, la perception d’une relation humaine se modifie, qui plus est après une psychanalyse, est essentiel.
Cependant, on nous parle de faits traités de manière « chirurgicale ». A signaler que ce terme apparaît souvent dans des critiques d’ouvrages dont le style est qualifié tel.
Que la jeune fille d’alors qu’était Vanessa Springora ait idéalisé l’écrivain Gabriel Matzneff, nul doute.
Que l’écrivain ait abusé des projections de l’adolescente, sans doute aussi.
Et que la mère de l’adolescente ait été prise entre le fer et l’enclume tandis qu’elle n’avait d’autre choix que de redouter le suicide de sa fille ou de la laisser convoler avec le quinquagénaire lettré, est tout aussi probable.
Le cadre ainsi posé, on mesure le piège dans lequel est alors tombé Vanessa Springora.
La femme qu’elle est devenue dit ne pas avoir voulu se venger ni accuser l’écrivain dans « Le Consentement ».. On la croit.
Il n’en demeure pas moins que d’autres se sont chargés de clouer l’écrivain octogénaire au pilori.
Où est leur victoire quand on sait que ce seul livre, « Le Consentement », ne risque pas de déranger les moeurs de tant de prédateurs sexuels en liberté?
C’est cette condamnation d’un homme dont je n’ai jamais apprécié ni le comportement ni l’oeuvre qui me gêne. Non, il n’est pas une victime!
Il est un sacrifice tout trouvé déposé sur l’autel de la véritable pédo-criminalité.
Et si l’on s’entendait sur ce qui est conçu comme création culturelle?
Car l’arbitraire agit partout. Et ce qui est estimé relever de l’art l’est souvent par qui a le pouvoir de le décréter et de l’imposer tel.
Et c’est alors que ce qui a pu être porté au pinacle un temps, est descendu en flèche dans un autre temps.
On est là au coeur des liens établis entre art, idéologie et politique. Ce qui doit être montré l’est, le reste, aux oubliettes pour autant que la censure ne s’en mêle.
Quand l’oeuvre rend de l’être humain, ce mélange de grâce et de brutalité, de bonté et de cruauté, de grandeur et de petitesse qui le constitue, oui, cela peut déplaire, déranger, heurter.
Mais qui, de celles et ceux qui se drapent de la vertu qu’accorde, par exemple leur fonction, ne recèle au fond d’elles et d’eux-mêmes, l’une des dimensions de l’être que dévoile l’oeuvre jetée au rebut?
S’en détourner n’est que mieux sauter un obstacle et condamner qui l’a placé sur un chemin qui ne doit mener que là où le panneau de la fausse morale l’indique.
Tous ces jours-ci, les médias ne ménagent pas leur peine pour relater autant d’affaires de pédo-criminalité qui visent divers milieux parmi lesquels ceux du clergé, de la médecine, du cinéma, de la littérature.
Autant de domaines où se déploie l’activité humaine et où dominent, le plus souvent, confiance et estime.
En seraient-ils dénués, tous ces milieux alors que tant de vocations s’y révèlent, tant de réels talents s’y exercent parce que, soudain, on y découvrirait quelques comportements répréhensibles?
Non. Et surtout pas.
Car y ramener les quelques personnes qui les salissent pour d’autant les rejeter, c’est comme le dit si bien l’expression « jeter le bébé avec l’eau du bain ».
Alors, de grâce, ne mélangeons pas tout!
« Je veux comprendre pourquoi je suis devenu comme ça. » Cette remarque émise par un chirurgien pervers parmi les pervers a été relayée par son avocat.
Le problème, bien sûr, reste de savoir si, au-delà des réponses qui seraient fournies à la question qu’il (se) pose, son mal s’en verrait modifié. Or rien ne l’assure.
Car sauf à ce qu’une démarche intellectuelle ne contribue à mettre en place des garde-fous, ce qui n’est jamais garanti, elle ne satisfait le plus souvent qu’elle seule.
Et c’est la plupart du temps ainsi, qu’au détriment de l’ensemble des compétences et des talents qui signent une personnalité, son mal l’emporte.
Quand, dans une quarantaine ou une cinquantaine d’années, à la faveur d’un nouveau mouvement, #youtoo, par exemple, quand à sa suite donc, des êtres s’élèveront et vous pointeront du doigt, vous?
Vous qui avez encouragé la parentalité à n’importe quel prix? Vous qui aurez accepté que des ventres soient payés pour enfanter, vous qui aurez toléré ainsi l’achat d’enfants, comment réagirez-vous?
Quand les générations prochaines mettront vos agissements en cause, que leur expliquerez-vous?
Quand parents 1 et 2 seront à la barre pour tenter de justifier l’amour qu’ils ont voué à leur créature payée au prix fort?
Quand les mères porteuses, par exemple, diront comment elles ont vécu autant d’amour porté à l’enfant qui n’aura jamais été le leur?
Quand vos agissements, cautionnés au nom du « droit À l’enfant » seront reconsidérés? Et qu’ils seront évalués au nom du droit DE l’enfant?
Parce que, pour autant d’enfants achetés, on ne leur aura même pas demandé leur consentement.
On les aura conçus avec des femmes le plus souvent engluées dans la misère et prêtes à tout pour y survivre. On leur aura demandé leur accord pour quelques deniers et, à la clé, un enfant à porter.
Et on se sera réjoui de l’aimer, du reste, pourquoi s’en soucier?
Les années prochaines le diront, si jamais tout abus avait été commis. Et on souhaite vivement que tel ne soit pas le cas. Cependant, rien ne l’assure.
Et le jour viendra peut-être ou une mère, un enfant porté par elle et élevé par des parents 1 et 2 s’empareront de la langue pour dire ou écrire comment ils auront vécu ce commerce.
Dans une tribune publiée par Le Monde, l’Académicien français Dominique Fernandez soulève d’importants aspects en lien avec l’affaire qui vise Gabriel Matzneff.
D’emblée il le précise ce n’est pas la défense de la pédophilie qu’il prend. Pédophilie « moralement condamnable, légalement punissable » et dont les « abus criminels » ne peuvent en rien se justifier.
Non, c’est la défense d’un homme désormais « traîné dans la boue » tandis qu’il y a peu encore, il était loué, « pour les mêmes livres qui le font mettre actuellement au pilori. »
Et de rappeler comment, « depuis plus de quarante ans, tout le monde était au courant de ses mœurs, dont il ne se cachait pas, puisqu’il en faisait lui-même l’étalage ; et voici que, tout d’un coup, avec une unanimité hypocrite, s’élèvent des clameurs d’indignation. »
Quant à Marie Darrieussecq, qui se réjouissait, dans le JDD, que cette affaire mette « un terme à la domination masculine sur les femmes. », il signale combien de propos est « déplacé, car ladite domination s’exerce aussi bien sur des garçons que sur des fillettes. C’est la domination de l’adulte sur l’enfant qui est en cause, et la fameuse question du consentement. »
Vient ensuite le constat selon lequel les « premiers défenseurs de Matzneff se rétractent, ses amis le lâchent un à un. Tous s’achètent une bonne conscience en attaquant un homme à terre. Ceux qui l’avaient encensé en parfaite connaissance de sa vie privée se drapent maintenant dans une vertu opportuniste. (…)Son principal éditeur, Antoine Gallimard, vient de donner le coup de grâce, en annonçant qu’il retire son journal de la vente, ce qui signifie pour un auteur la mort professionnelle, le renvoi dans le néant. (…)
Il en vient alors à rappeler « André Gide, qui allait en Algérie à la chasse des « petits Arabes ». Qu’on lui retire son prix Nobel ! A propos de Gide, l’Etat n’était pas si prude, il y a encore trois ans, puisque le ministre de l’éducation nationale mettait au programme des terminales littéraires Les Faux-Monnayeurs, roman ouvertement pédérastique. Ce ministre va-t-il offrir sa démission, pour une aussi grave atteinte à la moralité de jeunes adolescents ? »
Puis comment « Pasolini fut renvoyé de l’école où il enseignait en Italie, dans le Frioul, et obligé de s’enfuir à Rome parce qu’il avait entraîné des collégiens derrière des buissons. Va-t-on interdire ses livres et ses films ? Le Caravage a peint dans une pose impudique son amant tout nu de 12 ans : le musée de Berlin, pour contenter les familles, va-t-il mettre au rebut L’Amour victorieux admiré par des millions de visiteurs ? Que la curée n’épargne aucun chef-d’œuvre ! »
Et si jamais, pour qui l’aurait oublié, ce n’est qu’en 1945 que le seuil de la majorité sexuelle a été fixé, en France, à 15 ans. Jusque là, il l’avait été à 13 ans et avant cela, par une loi de 1832, à 11 ans. De quoi réfléchir au regard porté sur l’enfant…
Quand j’estimais que l’époque portait, à tous les sens du terme… L’époque et le milieu tout autant!
Quand j’évoquais un règlement de compte, justement au sein de ce milieu littéraire et éditorial parisien sinon germano-pratin!
Quand je soulignais combien de victimes de pratiques pédo-criminelles n’avaient que le silence comme réponse à leur maux!
Avant Vanessa Springora dont le livre atteint des records de vente en France, un autre texte jamais édité mais qui portait sur le même mal avait été écrit.
Et ce texte jamais édité a été, lui aussi, soumis à Grasset.
Accepté par une des ses collaboratrices, il a été refusé par son patron et par ses cadres dirigeants de l’époque.
Or il se trouve que l’auteure de l’ouvrage jamais édité ne s’est jamais remise non plus. Qui va s’en soucier? La justice? Vanessa Springora? Grasset désormais ou une autre maison d’édition?
La vie comme elle va, avec ses unes médiatiques, ses unes littéraires et ses tristes silences.
On entend souvent prôner le développement de la « culture » par l’allocation de fonds destinés à la soutenir.
Définit-on le terme de « culture », rien n’est moins sûr.
Mais on sous-entend sans doute qu’il est inutile de rappeler ce que signifie « culture ». Pourtant, chacune et chacun en aura sa version qui ne sera pas celle de toutes et tous.
Quoi qu’il en soit, on pense, en général, que de s’adonner à la lecture, à la peinture, à la sculpture, la danse, la musique et j’en passe, sera toujours préférable que d’errer ou de sombrer nulle part.
Parce que développer un art à quelque niveau que ce soit, est le plus souvent considéré comme une pratique louable, voire noble.
De là vient le prestige, l’aura même qui entoure les personnes qui ont réussi à s’imposer dans un domaine quelconque de la « culture ».
On le sait, pourtant, et Jean-Paul Sartre l’a écrit, « la culture ne sauve rien ni personne ». Je l’avais rappelé ici-même, il y a un peu plus d’un an.
Et non seulement la culture ne « sauve rien ni personne » mais, poursuit le philosophe, « elle ne justifie pas. Mais c’est un produit de l’homme: il s’y projette, s’y reconnaît; seul, ce miroir critique lui offre son image. ».
Cette citation extraite de son livre Les Mots, paru en 1964, résonne d’autant mieux quand on sait comment Jean-Paul Sartre et d’autres personnalités du monde des Lettres entre autre, ont soutenu Gabriel Matzneff.
L’écrivain ne s’est jamais caché de ses pratiques perverses dont il fait étalage avec un narcissisme accompli.
Or dans le même temps, il a été reconnu pour sa « culture » . Et c’est dans ce sens que la conception que Sartre en donne prend tout son sens.
En ceci qu’elle renvoie une image qui n’a gêné aucune et aucun de celles et ceux qui ont apprécié l’écrivain désormais mis au ban de la société.
Qu’en est-il, aujourd’hui, de ce « miroir » que serait la « culture »?
Serait-il celui qui avait renvoyé des images qui, en leur temps pas si lointain, avait défrayé la chronique et desquelles on ne parle plus trop?
Images qui montraient comment la fête de la musique était célébrée à l’Elysée?
On entendait des mots peu flatteurs pour les femmes. Qu’en a-t-on dit? qu’ils relevaient de l’art?
De la pédo-criminalité qu’entoure un large silence, un autre « consentement » parce que largement pratiquée sans que les responsables de réseaux qui la favorisent ne paraissent inquiétés, s’en souciera-t-on enfin?
Parce que c’est facile de s’en prendre à un écrivain dont, je ne le répéterai jamais assez, je n’ai jamais lu aucun livre. Dont je ne cautionne en rien les pratiques sexuelles mais au sujet duquel je constate qu’il semble tenir lieu de proie idéale.
Car une hypocrisie manifeste entoure cette mise au pilori d’un homme autrefois encensé.
Condamné avant l’heure, si condamnation par la justice il doit y avoir, il se voit lâché par nombre de celles et de ceux qui ne cachaient pas leur soutien voire leur admiration du temps où il était convié à s’exprimer par tant de médias.
Je vous invite à découvrir cette séquence publiée par « Le Parisien ».
On s’interroge, on se dit que, vraiment, cette jeune fille qu’était Vanessa Springora à l’époque des faits qu’elle relate dans son livre était bien seule.
Que la racine de ses problèmes est à trouver dans le contexte parental et social. Que c’est, à l’évidence, ce qui a permis à son prédateur d’agir.
La jeune fille était en quête d’affection, en quête d’amour, en quête d’idéal. Elle a cru le trouver en G.M.
Combien d’enfants, plus jeunes encore que l’auteure de ce livre restent victimes de criminels en liberté et, pour nombre d’entre eux, en col blanc?
A quand un ouvrage qui les livrera, eux aussi, à la justice?
Rêvons un peu, après tout, si cet ouvrage de Vanessa Springora pouvait contribuer à une prise de conscience générale et pas qu’en seul lien avec le milieu littéraire germano-pratin, ce serait tout cela de bon!
Dans la déferlante actuelle qui vise l’écrivain Gabriel Matzneff suite à l’ouvrage signé Vanessa Springora, je songe, ici, à une autre Vanessa, Vanessa Schneider, auteure de « Tu t’appelais Maria Schneider ».
Vous vous rappelez sans doute cette actrice, rendue célèbre par son rôle dans « Le Dernier Tango à Paris ». C’est d’elle et de sa relation à elle que parle sa cousine Vanessa Schneider dans son ouvrage.
Si vous ne l’avez pas lu, je ne saurais que chaudement vous en recommander la lecture.
Il s’agit là d’une évocation aussi fine que sensible et très émouvante de la jeune actrice et de la famille de l’auteure aussi.
Par exemple, on apprend comment Marlon Brando, après le tournage du film et sa sortie en salle, n’a cessé de rester en relation avec sa partenaire.
On y découvre, aussi et surtout, la triste descente vers la drogue de Maria Schneider et comment l’entourage familial a été présent à sa manière.
Mais ce livre de Vanessa Schneider ne semble pas avoir amené à interdire l’exploitation du film de Bernardo Bertolucci tout comme il a été décidé, après la parution de l’ouvrage de Vanesa Springora de retirer de la vente des livres de Gabriel Matzneff.
Apparemment, Vanessa Springora a réussi à surmonter cette relation à laquelle elle reconnaît avoir consenti et c’est tant mieux pour elle!
Apparemment, Maria Schenider ne s’est jamais remise de la scène que lui a imposée le réalisateur du film « Le dernier tango à Paris ». Cette scène, c’est elle qui a rendu le film aussi célèbre.
Cette scène, c’est elle qui a détruit la vie de Maria Schneider.
Cinéma, bien sûr et scène simulée! Cependant, si l’on en arrive à interdire la vente de livres, autant poursuivre cette voie et interdire toute oeuvre incitant à la violence.
Et là, alors, on sera dans ce monde refaçonné par autant de vertueux personnages qui décident de ce qui doit et ne doit pas être rendu accessible au public tandis que d’autres poursuivent en toute impunité leurs pratiques pédo-criminelles.