Dans l’émission « La Grande librairie » d’hier, 30 juin, il était question de poésie, de langue et de beauté.
On y découvrait un Sylvain Tesson plus inspiré que jamais, des jeunes lire de la poésie, oui, cela existe encore… Et ces jeunes ne sont pas des exceptions qui confirmeraient la règle selon laquelle ils ne liraient plus.
Quoi qu’il en soit, en cours d’émission, lorsqu’il a été question de beauté, c’est à nouveau à ce sempiternel « la beauté sauvera le monde » qu’on a eu droit.
Or ce qu’a écrit Dostoïevski est bien plus subtile! Je l’avais rappelé ici, déjà.
Dans son roman L’Idiot, il fait s’adresser Hippolyte Terentieff au prince Mychkine et montre comment le premier fait de son interrogation une affirmation:
« Est-ce vrai, prince, que vous avez dit, une fois: « c’est la beauté qui sauvera le monde? » Et Hippolyte Terentieff de poursuivre: Messieurs, (…) le prince prétend que la beauté sauvera le monde! »
Ce qui apparaît donc bien, dans cet échange entre les deux personnages du roman, est l’absence de réponse du prince à la question qui lui est posée sur ce qu’il aurait dit de la beauté.
Mais Terentieff fait de sa question une affirmation.
Et c’est exactement ce qui se produit lorsqu’on prétend que Dostoïevski aurait écrit que « la beauté sauvera le monde ». C’est aussi faux que réducteur car ce qu’a montré l’écrivain est infiniment plus fin.
En l’occurrence, dans L’Idiot, ce qui est mis en avant par Dostoïevski est l’énigme que représente la beauté.