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Nouveaux entretiens avec Jacques BAUD sur complotisme et complots

Jacques Baud, nous avons largement évoqué le complotisme mais pourtant, des complots existent. Comment distinguez-vous le complotisme de l’identification de complots réels?

Jacques BAUD:– Comme nous l’avons vu, le conspirationnisme consiste à voir – pour un événement particulier – l’enchaînement de faits comme un phénomène construit et volontaire afin de poursuivre un objectif déterminé (souvent peu avouable). Par exemple, le fait d’affirmer que le gouvernement russe a tenté d’empoisonner Navalny (ou Skripal) est typiquement conspirationniste: on sait que Navalny est un opposant, on sait qu’il a été empoisonné, on a retrouvé des traces de « Novitchok » et on sait que la Russie est l’un des pays où le Novitchok a été synthétisé; mais le fait d’établir un lien univoque entre ces éléments pour affirmer qu’il s’agit d’une opération du gouvernement russe relève de la construction intellectuelle. D’ailleurs, le communiqué du gouvernement allemand n’accuse pas la Russie et se borne à demander des explications.

Ces liens artificiels ne peuvent souvent être élaborés qu’en excluant d’autres possibilités (par exemple, la possibilité que Navalny ait été empoisonné par l’une des nombreuses personnes corrompues contre lesquelles il lutte et qui sont liées à la mafia). L’exclusion de ces autres possibilités relève le plus souvent du négationnisme. Par exemple:

Ce ne sont que deux exemples de leurs jugements basés sur des éléments tronqués et qu’Hannah Arendt appelait « défactualisation », qui illustrent une caractéristique centrale du complotisme : attribuer une cause unique à des faits avérés.

Le complotisme est moins lié à ce que l’on pense, qu’à la manière dont on construit sa pensée. Lorsque cette dernière est construite en fonction d’une posture idéologique, elle tend à chercher à confirmer une conclusion préétablie. C’est le problème de la majorité des « fact-checkers » et de ceux qui prétendent lutter contre le complotisme: bien souvent, ils finissent par substituer un complotisme à un autre. La lutte contre le complotisme, lorsqu’elle n’est pas faite sérieusement, n’est rien d’autre qu’une manière de manipuler l’opinion. Le complotisme n’est pas simplement le fait d’envisager des hypothèses dans une situation où la réalité n’est pas claire, mais lorsqu’on tente d’imposer l’une d’entre elles.

Nous avons déjà évoqué le quotidien Le Temps dans le contexte du complotisme. Le 22 octobre, relatant une conférence de presse de John Ratcliffe, Directeur du Renseignement National (DNI) américain, ce quotidien suisse, qui se veut être la référence suisse du journalisme de qualité, déclare que la Russie et l’Iran ont entrepris des actions pour influencer la présidentielle du 3 novembre. Pourtant, rapportant le même événement, Reuters affirme qu’ « il n’y a aucune preuve concluante » de cette accusation, tandis que selon le Washington Post, les métadonnées recueillies à partir des e-mails ont montré l’utilisation de serveurs en Arabie saoudite, en Estonie, à Singapour et aux Émirats arabes unis. Certes, le quotidien suisse ne fait que relater une conférence de presse, mais on note que le quotidien n’a pas la même « assiduité » pour relater que John Ratcliffe a déclassifié des documents en septembre 2020, qui tendent à montrer que « l’ingérence » russe lors de la présidentielle de 2016 était – en réalité – le fait des Démocrates, qui cherchaient à engager une procédure de destitution contre Trump… C’est cette absence de rigueur dans l’application d’une déontologie journalistique qui ouvre la porte au conspirationnisme.
Ainsi, ceux qui sont très prompts à dénoncer le « conspirationnisme » son-ils souvent les mêmes qui tendent à influencer l’opinion en fonction de leurs propres préjugés.

Le conspirationnisme est généralement associé au développement des réseaux sociaux. C’est très partiellement vrai, mais c’est souvent une illusion d’optique: la plupart des « théories du complot » « sérieuses » que l’on évoque habituellement sont très antérieures aux médias modernes et aux réseaux sociaux. Internet n’est pas seulement un moyen de propager des fausses nouvelles, mais aussi un outil pour les neutraliser… à condition d’être bien utilisé! Avant 1990, 80% des Américains considéraient l’assassinat de Kennedy comme un complot, mais ils ne sont aujourd’hui que 60% . En fait, la majeure partie des théories complotistes circulent entre « convaincus ». L’émergence de théories alternatives a le plus souvent son origine dans la communication déficiente des autorités, qui, pour des raisons diverses, tentent de cacher leurs propres erreurs.

Merci à Jacques Baud de ses éclairages dont la suite sur ce même sujet est pour demain! Quant aux précédents entretiens, vous les trouverez ici 

Politique, Voix

Nouvelle nouvelle…

Professeur décapitéL’assassin était en contact avec un djihadiste russe, ainsi informe le site 20 minutes.

Pour continuer par L’identité du djihadiste n’a pas été établie mais son adresse IP indique qu’il serait basé à Idleb, dernier bastion rebelle et djihadiste en Syrie.

Que comprendre? Que la Russie est encore une fois à l’oeuvre?

Que la Russie déchaîne ses pires éléments contre la France?

Décidément, faire entrer dans la tête d’un lectorat qui ne va pas chercher midi à quatorze heures ni se compliquer la vie que la Russie est là partout où l’on tue semble devenir la ligne éditoriale à suivre.

Et l’on ose encore parler d’information…

Culture, Economie, Politique, société, Voix

Prix Sakharov décerné aux « femmes et aux hommes de l’opposition démocratique en Biélorussie »

Cette année, le Prix Sakharov a été décerné « aux femmes et hommes de l’opposition démocratique en Biélorussie ».

L’an dernier, vous vous en souvenez peut-être, ce prestigieux Prix, c’est un économiste ouïgour qui l’a reçu tandis qu’étaient aussi en lice de jeunes Kenyanes qui avaient créé une application pour lutter contre l’excision.

Et puis, en 2018, le cinéaste ukrainien Oleg Sentsov s’était vu honoré de ce Prix.

Cinéaste controversé, qualifié de terroriste par Moscou mais récompensé malgré tout par la Conférence des Présidents du Parlement européen pour laquelle, peut-être, ce que le Kremlin estime n’a de crédit qu’auprès de ses « idiots utiles ».

Ainsi va l’information qu’elle doit nous faire comprendre qui sont les gentils, qui sont les méchants.

Inutile de dire que si vous vous risquez, ne serait-ce qu’à nuancer cette vision du monde, vous vous exposez à forte réaction et opposition.

Quand ce n’est pas, bien sûr, le label de « conspirationniste » qui vous est d’emblée attribué.

On peut ironiser, bien sûr, que reste-t-il, sinon, pour qui souhaiterait moins de parti pris affiché sans le moindre recul?

Culture, Histoire, Politique, société, Voix

Après les empoisonneurs, les pirates russes…

Le grand quotidien Le Monde se fait le relai des poursuites lancées par la justice américaine à l’encontre de six pirates qui seraient issus ds services de renseignement russe. C’est dans le cadre de l’affaire Macronleaks… Bigre, ces Russes, décidément, je ne sais pas si vous remarquez mais ils n’arrêtent pas!

De garder la main sur la Biélorussie, d’empoisonner un blogueur paraît-il « premier opposant de Vladimir Poutine » , de terroriser la France avec des « Russes-Tchétchènes » auxquels elle a justement donné asile, victimes qu’ils étaient de guerres menées par le Kremlin, la liste est longue encore des maux qu’ils nous imposent, ces Russes!

Imaginez un peu, quelle idée aurions-nous, en Occident, de prêter main forte à la corruption, de se débarrasser de gêneurs qui, par miracle, survivent à un empoisonnement, de mener une guerre sans merci à de pauvres gens terrorisés qui terrorisent à leur tour, bref, de nous fourvoyer dans autant d’actes malveillants?

La Russie a tout faux depuis des années.  Quand elle était soviétique, elle était une menace, désormais, tout autant sinon plus encore. On vous expliquera que c’est normal, que son Président est un ancien du KGB, etc.etc. Et surtout, on se gardera bien de ne pas rappeler le passé de la Nobel de littérature 2015, dressant les louanges d’un homme qui n’a pas eu, pour réputation, d’être un ange…

Bon, c’est vrai, je serais « russophile »… c’est ainsi que, du temps où j’ai encore eu les honneurs de la RTS, on me présentait. Comme si c’était un titre, une qualité, un défaut, allez savoir, en tous les cas, je n’ai jamais su de quel pays les partenaires avec lesquels je me suis entretenue étaient «- philes », amis.

C’est que, pour nos journalistes, aimer la Russie doit sans doute être signalé. A leur décharge, il est vrai qu’en pareil contexte, cela équivaut à peu près à jouer les kamikazes…

Politique, Religions, société, Voix

21 juin 2015, 26 juillet 2016, 16 octobre 2020, décapitations sur sol français

Encore un Russe!

Oui, vous avez donc bien toutes et tous entendu et lu que la décapitation d’un professeur, commise sur sol français, a été le fait d’un « Russe-Tchétchène ».

Mieux, selon le Journal du Dimanche, on s’interroge sur la raison pour laquelle la justice française avait «  contraint l’État en 2011 à octroyer le statut de réfugié à la famille Anzonov »

Et pourquoi, « Après une longue instruction, l’administration avait refusé son maintien en France. »

Or, lit-on encore, « la Cour nationale du droit d’asile avait cassé cette décision. Depuis le mois de mars, Abdoullakh Anzonov était donc devenu, pour dix ans, un adulte en situation régulière. ».

Accueillir sur son sol des malheureux est noble.

Découvrir le résultat auquel on arrive avec certains d’entre eux ne doit, certes pas être généralisé. Sauf que la France n’en est désormais plus à son premier décapité.

Rappelez-vous, la première tête fichée sur une grille, c’était le 26 juin 2015, à Saint-Quentin-Fallavier. Un an plus tard, le 26 juillet 2016, le Père Jacques Hamel est égorgé à Saint-Etenne du Rouveray.

Charité oblige?

Culture, Histoire, Politique, société, Voix

Guerre dans le Haut-Karabagh, hommage

La guerre, certains l’ont connue dès leurs plus jeunes années.

D’autres ne sauront jamais à quoi elle ressemble sinon aux images qu’ils en découvrent ici ou là ou au gré de récits qu’on leur en rapporte.

A partir de là, juger, même si nombre de celles et ceux qui appartiennent à cette seconde catégorie ne s’en privent pas, juger reste aisé.

Chaque camp a ses raisons très valables de s’attaquer à l’autre, les compte-rendus qui nous sont livrés de combats par l’une ou l’autre des factions en place en témoignent.

Pour ce qui concerne le conflit armé qui ensanglante le Haut-Karabagh et qui aurait dû s’arrêter après le cessez-le-feu signé à Moscou par les belligérants, on l’a vu, il se poursuit.

Et quand vous apprenez la mort au combat d’un étudiant de l’Université française d’Arménie, UFAR, pour laquelle vous avez été nommée juré d’un concours nommé « Premier prix de l’espoir francophone », vous n’avez que les yeux pour pleurer.

Toutes mes condoléances et mes pensées à sa famille et à ses proches.

Culture, Politique, société, Voix

12 octobre 2019, une femme…

«  Je m’appelle Hevrîn Xelef. J’ai été violée et lapidée par les mercenaires de la Turquie le 12 octobre 2019 au Rojava car je travaillais pour une Syrie démocratique, féministe et pluraliste. Le monde entier a vu mon calvaire grâce à mes bourreaux qui ont filmé toute la scène et l’ont partagée sur les réseaux sociaux. Seule une de mes chaussures était restée intacte de l’horreur que j’ai vécue. C’est cette chaussure que ma mère a serré dans ses bras, à la place de mon corps mis en morceaux par mes bourreaux … et c’est sur ma tombe que ma mère a soufflé mes 35 bougies un mois après ma mort, le 15 novembre 2019.

Cela fait un an que je suis morte. Mais rien n’a été fait contre mes assassins car ils ont agi sous les ordres de la Turquie membre de l’OTAN et de l’ONU tandis que moi, je fais partie du peuple kurde apatride, laissé pour compte par les puissances mondiales et régionales qui approuvent l’occupation du Kurdistan par les États colonialistes de la région : Turquie, Syrie, Irak, Iran.

Cela fait un an que j’ai rejoint le long cortège composé de fillettes et de femmes kurdes/yézidies, arméniennes, assyriennes… violées et tuées par les forces turques ou jihadistes sur nos terres depuis un siècle car nous avons eu le malheur de ne pas être turques/sunnites.

Hevrîn Xelef, secrétaire général du parti Avenir de la Syrie, a été assassinée par … » 

Regardez la photo de l’article indiqué en lien ci-dessus, la beauté du visage de cette femme!

On cherche les féministes qui se mobiliseraient pour dénoncer l’atrocité du sort subi par leur semblable, les stars qui se bousculeraient pour crier leur indignation, les « people »  de tous pays et de tous genres qui défileraient pour rappeler les droits humains bafoués!

Au lieu de quoi, nous enveloppe ’un assourdissant silence.

Histoire, Politique, Voix

Haut-Karabagh, un cessez-le-feu déjà violé

On s’est réjoui du cessez-le-feu signé à Moscou entre les ministres des affaires étrangères azéri et arménien. Un accord a été trouvé à Moscou sous la médiation de Sergueï Lavrov.

Or que se passe-t-il sur le terrain?

Selon ces nouvelles reçues ce soir d’Erevan, les attaques ont repris en Artsakh.

Le ton du billet est amer.

Comment autrement lorsque l’on est sur place et originaire de l’un des pays en guerre?

Qui a tort, qui a raison, qui a ouvert les hostilités, comme souvent, c’est l’autre. Il ne s’agit pas, ici, de prendre parti mais de relayer un écho, triste.

Culture, société, Voix

8 octobre 2010 – 8 octobre 2020, un blog

Le 8 octobre 2010, sur la plateforme mise à disposition par la Tribune de Genève, j’ouvrais ce blog. J’y partageais de brefs textes sous le pseudo « Chant du cygne ».

Le premier était intitulé Knjaz’, mot russe qui signifie Prince.

Près de 2’000 sujets suivis de 25’000 commentaires publiés plus tard, le blog a été menacé d’abord, fermé ensuite.

Histoire passée qui s’est déroulée entre décembre 2019 et février 2020, l’aventure se poursuit ici depuis lors.

Soyez toutes et tous remercié(e)s de l’accompagner de vos remarques déposées ici ou là au gré des réseaux sociaux ou sur le blog lui-même.

Quant au Knjaz’ ou Prince qui a donné son titre au premier sujet de ce blog, il tenait bien plutôt de celui du roman de Dostoïevski Идиот,  l’Idiot, que de tout autre inutile à quelque « propagande » ….

Economie, Politique, société, Voix

Covid-19, essai de 14e synthèse autour des « complots »

Sans doute l’avez-vous constaté, le nouveau dada ou cheval de bataille de nos médias consiste à nous informer ou à nous mettre en garde, comme vous voudrez, contre les « complotistes » en tous genres.

Le prestigieux ou autrefois prestigieux journal Le Monde n’y échappe pas qui nous dresse la liste sans doute non exhaustive des figures les plus représentatives qui incarnent la tendance « complotiste ».

De réputation moins internationale que le titre de presse cité plus haut, la Tribune de Genève, se fend, elle, de références mondaines qui nous livrent leurs conseils au cas où nous devrions nous retrouver en compagnie d’adeptes de ces approches « complotistes ».

On se demande vraiment à quoi en sont réduits ces médias qui estiment bon et utile de nous « informer » d’autant de points de vue émis par tel ou telle qu’avec le moindre sens critique, chacune et chacun est à même de rejeter.

Et puis, si, au contraire, ces théories pour plusieurs d’entre elles, rencontrent autant d’adeptes, eh bien serait-il à ce point primordial de les mettre en garde contre le danger auquel ils ou elles s’exposent?

Non, sans doute est-ce pour protéger le reste de nos sociétés de pareils agissements qui pourraient leur être préjudiciables.

Mais enfin, l’ensemble de ces croyances n’a pas attendu la crise sanitaire dans laquelle le monde est plongé pour exister! De longue date, ces fervents partisans de solutions miracles existent et recrutent.

Ils s’inscrivent en marge de la médecine dite officielle. Cette épidémie ou pandémie n’a contribué qu’à les faire ressortir du bois.

Ces deux médias, pour ne parler que de ceux cités plus haut, craindraient-ils à ce point l’influence de théories dont les pouvoirs salvateurs restent, pour bon nombre d’entre elles, encore à démontrer?